Communiqué de presse · Jeudi 23 mai 2024
Ce mercredi 22 mai, le Conseil municipal de la Ville de Genève a voté à une nette majorité une résolution (R-314) [1] pour déclarer son opposition au projet d’élargissement à 6 voies du tronçon Nyon-Le Vengeron de l’autoroute A1. Après Nyon, c’est désormais Genève qui refuse un projet catastrophique qui amènerait, selon l’OFROU elle-même, des milliers de voitures supplémentaires dans une ville déjà saturée.
Ce projet fait partie d’un paquet autoroutier qui sera soumis au vote au niveau fédéral en novembre 2024, grâce au référendum déposé par une large alliance menée par actif-trafiC et l’ATE qui a récolté plus de 100'000 signatures.
Avec 39 voix pour et 24 voix contre, le signal envoyé par le Conseil municipal de la Ville de Genève est clair: Genève ne veut pas de cette méga-autoroute d’un autre temps qui va augmenter massivement le trafic en ville, causer d’importants dommages environnementaux sur son tracé et engloutir des centaines de millions de francs pour freiner l’indispensable transfert modal vers les mobilités collectives et actives, à rebours complet de l’urgence et des objectifs climatiques désormais inscrits dans la loi.
Graphique issu du rapport technique de l'OFROU [3]
44'000 voitures supplémentaires chaque jour au Vengeron
La résolution votée s’inquiète tout d’abord du trafic induit que créerait l’élargissement. Car toutes les expériences le démontrent: élargir les routes crée un appel d’air qui entraîne un surcroît de trafic qui n’aurait pas eu lieu sans élargissement. Ce phénomène se vérifie d’autant plus qu’on est dans une zone urbaine et que la route en question est déjà embouteillée avant l’élargissement: deux conditions parfaitement remplies ici. [1]
L’OFROU (Office fédéral des routes) lui-même le confirme: dans son rapport technique issu du Projet général Vengeron-Nyon [2], l’office fédéral prévoit une forte augmentation du trafic dès la mise en service de l’autoroute élargie aboutissant à une nouvelle saturation en quelques années seulement. En à peine 12 ans, ce sont 44'000 voitures supplémentaires par jour qui sont prévues sur l’autoroute (à l'échangeur du Vengeron), menant l’autoroute à nouveau à saturation. Il faudra donc à peine plus de temps pour que l’autoroute soit saturée qu’il n’en aura fallu pour réaliser le chantier de l’extension.
Chiffres issus du rapport technique de l'OFROU (au chapitre des charges de trafic) [3]
Quasi-doublement du trafic arrivant à Genève par la sortie «lac»
Pour la Ville de Genève, les conséquences sont claires: la sortie «lac» de l’autoroute menant directement en ville verrait son trafic pratiquement doubler, de 8'300 à 14'000 véhicules par jour. La sortie à Versoix menant à l’aéroport verrait, elle, un surcroît de +15'000 voitures / jour! Tout ce trafic supplémentaire viendra pour une large part s’embouteiller dans l’entonnoir urbain de la Ville de Genève, par la route de Lausanne ou par la nouvelle route des Nations. Le reste du trafic supplémentaire ira encombrer les autres communes du Canton, qui suffoquent déjà sous un trafic motorisé excessif. Une pure folie!
Des terres agricoles et des centaines d’arbres sacrifiés
La résolution s’inquiète aussi à juste titre de l’impact environnemental majeur du projet. Avec 3820 m2 d’emprise sur les terres agricoles dans le Canton, 9’775 m2 de défrichement de forêts d’importance cantonale à Genève, 3500 m2 d’emprise sur un site prioritaire cantonal pour la conservation de la flore à Céligny ainsi que des atteintes massives à des espèces piscicoles protégées, le projet est un désastre.
Rappelons aussi que cet élargissement ne fait sens que si le reste de l’autoroute est aussi élargie… faute de quoi le goulet d’étranglement ne sera que déplacé. Or les projets suivants, en particulier l’élargissement de l’autoroute de contournement (à 7 voies!) promettent d’être encore plus destructeurs pour plusieurs réserves naturelles et pour des terres agricoles. Il faut stopper cette fuite en avant!
Gaspiller des milliards pour foncer toujours plus vite dans le mur?
Enfin, le Conseil municipal dénonce le coût faramineux d’un projet qui freinerait le report modal sur le train et les mobilités actives. En effet, ce projet à près d’un milliard s’inscrit dans un paquet de 5,3 milliards, qui n’est lui-même que le premier paquet de 35 milliards d’investissements prévus par la Confédération dans des nouveaux projets autoroutiers d’ici 2040 environ! À ces montants colossaux s’ajoutent encore des frais d’entretien qui se chiffrent aussi en milliards.
Ces dépenses insensées sont totalement contradictoires avec l’urgence climatique déclarée en Ville de Genève, avec sa Stratégie Climat mais aussi la loi climat fédérale votée par la population en 2023 qui prévoit une baisse de 57% des émissions du secteur des transports d’ici 2040 et de 100% d’ici 2050 (neutralité carbone).
Suite au vote de cette résolution, l’exécutif municipal de la Ville de Genève doit désormais prendre position publiquement sur ce sujet et organiser la résistance avec les autres communes notamment à travers l’Union des Villes Genevoises, mais aussi du côté vaudois, pour faire un front commun contre ce projet d’un autre temps.