Ce lundi 26 février, le Salon de l’Auto fait son retour à Genève avec le slogan : «Auto.Future.Now». Alors que nous vivons le dixième mois d’affilée battant tous les records mensuels et que l’industrie automobile joue un rôle majeur dans la crise climatique, nous répondons «Auto: No future!». actif-trafiC, l’ATE Genève et Vaud, solidaritéS Genève, la Jeunesse socialiste Genève, les Jeunes Vert-exs Genève et Vaud ainsi que le collectif Grondements des terres dénoncent cet événement dont la place est dans les livres d’histoire.
Après 4 ans d’absence, le retour d’un événement glorifiant un mode de transport ultra-polluant, énergivore et inefficace est choquant. En pleine catastrophe écologique, faire l’éloge de la voiture n’est tout simplement plus acceptable. Avec audace, les organisateurs prétendent à un «avenir automobile durable». Nous leur répondons que l’avenir réside dans les transports collectifs et actifs et dans un aménagement de proximité, car aucun aspect de l’automobile – électrique ou non – n’est durable: ni sa construction, ni son utilisation, ni ses implications sur le territoire.
Une industrie par essence insoutenable
En effet, pour assurer sa rentabilité, l’industrie automobile s’est au fil des décennies standardisée vers la (sur-)production de véhicules multi-usages. Chacun·e s’équipe d’un véhicule prévu pour transporter 5 personnes et des bagages, pouvant rouler jusqu’à 160km/h avec environ 500km d’autonomie. On l’utilise ainsi au mieux 2 à 3 semaines par an pour des vacances en famille. Tout le reste du temps, le véhicule ne sert généralement à transporter qu’une seule personne sur de courtes distances, générant donc un gaspillage colossal de matières, d’énergie et d’espace. Pire : la SUV-érisation du parc aggrave encore la situation et accroît les dangers pour les autres usager· ères de la route. L’industrie automobile doit être avertie : leur business et leurs salons d’exposition de véhicules n’ont plus de place sur cette planète !
Incompatible avec l’urgence climatique
Les transports sont responsables de 38% de nos émissions de CO2 en Suisse, dont 71,2% sont émises par les voitures de tourisme, soit 9,7544 millions de tonnes de CO2 par an. Les engagements climatiques pris par la Suisse lors de l’Accord de Paris et confirmés par la loi climat votée en juin 2023 par le peuple (–57% d’ici 2040 dans le secteur des transports et –100% d’ici 2050) sont un défi immense qui impliquent nécessairement un tournant majeur en matière de mobilité avec une réduction massive et rapide du trafic motorisé.
Car les voitures électriques ne permettront pas d’atteindre nos objectifs. En effet, fabriquer des batteries étant très énergivore, la production d’une voiture électrique émet donc bien plus qu’un modèle thermique: de +25% au mieux, jusqu’à +100%. La tendance à des véhicules lourds et encombrants n’arrange rien. Pour les véhicules thermiques, plus des trois quarts des émissions sont liés à l’usage des voitures. Pour l’électrique, trois quarts de l’impact climatique vient de la production du véhicule. Prétendre qu’on peut atteindre nos objectifs climatiques avec les voitures électriques, c’est «oublier» le surcroît d’émissions engendrées à l’étranger par la production des batteries, sans même parler de l’extraction du lithium. Polluer davantage ailleurs pour polluer un peu moins chez nous? C’est hypocrite!
Rompre les liens entre les autorités et une industrie toxique
Le report des automobilistes vers des transports collectifs et actifs est donc indispensable. Par exemple, le Plan climat cantonal genevois adopté en 2019 prévoit une réduction du trafic de –40% d’ici 2030 et de –80% d’ici 2050. La Ville de Genève quant à elle souhaite diviser par deux les distances parcourues en transports individuels motorisés à l’horizon 2030. Comment les autorités cantonales et municipales concilient-elles leurs objectifs et la tenue de ce Salon sur le territoire?
«Il existe une forte et décevante dichotomie entre les promesses de nos élu·es, tant sur le plan municipal que cantonal, et les actes faits par celleux-ci concrètement, marqués par la tenue d'un salon allant à l'encontre des objectifs climatiques.» souligne Federico Di Napoli, pour le comité de la Jeunesse socialiste genevoise.
À l’heure où les effets du changement climatique sont toujours plus flagrants, la voiture n’a plus sa place au centre de l’attention, et un show d’une semaine qui en fait l’éloge ne devrait donc tout simplement pas avoir lieu. «Le Salon de l’Auto fête ses 100 ans en 2024, faisons en sorte qu’il ne souffle pas une bougie de plus !» suggère Angela Zimmermann, chargée de campagne chez actif-trafiC.
Rappelons que ce Salon a joué un rôle délétère dans l’histoire genevoise de la mobilité en permettant un rapprochement entre l’industrie automobile et les autorités. Chaque année, les représentant·es du secteur serrent la main et échangent avec des responsables politiques locaux et nationaux, jouant de l’influence que lui confère son importance économique. Et c’est en grande partie à cause de cette proximité que Genève a commis des erreurs historiques en arrachant son réseau de trams durant la deuxième moitié du XXe siècle, sous la pression du «tram-bashing» pratiqué par l’industrie automobile et ses relais locaux comme le TCS. Une erreur que la plupart des grandes villes alémaniques n’ont pas faite.
Le Salon de l’Auto doit laisser place à un «Salon du tournant de la mobilité»
Pour Théophile Michod, co-président des Jeunes Vert·exs Vaud, «ce salon illustre parfaitement un mode de vie individuel, égoïste et dépassé. Il est impératif que cesse la promotion à outrance de ce mode de transport trop polluant et que l’on passe à des modes de transport plus écologiques.»
Nous demandons d’en finir à l’avenir avec cet événement qui va totalement à contresens de nos politiques climatique et de mobilité. A la place, nous suggérons l’organisation d’un «Salon du tournant de la mobilité» ouvert à la population qui expose les défis et solutions pour la transition des transports dans nos territoires pour sortir de la dépendance automobile et de l’étalement urbain, afin que toutes et tous puissent se déplacer le plus sobrement et le plus écologiquement possible, à un coût abordable. Nous nous tenons à dispositions des autorités pour discuter de la forme que cet événement pourrait prendre.
actif-trafiC · ATE Genève · ATE Vaud · solidaritéS Genève · Jeunesse socialiste Genève · Jeunes Vert-exs Genève · Jeunes Vert-exs Vaud · Grondements des terres