Les routes coûtent cher et les dommages provoqués par le trafic qui y circule ne sont pas pris en compte. La concurrence avec les transports publics est déloyale et le prix des billets explose. Un tournant est indispensable.
En septembre dernier, le parlement a voté un crédit total de 14,1 milliards pour les autoroutes : il y a bien sûr les 5,3 milliards pour les élargissements – l’objet du référendum – mais il y a aussi 8,8 milliards (!) pour l’entretien 2024 – 2027 des autoroutes existantes. En effet, maintenir ces in- frastructures soumises à un roulement quasi constant de milliers de véhicules coûte très cher.
Ce n’est pas tout, car c’est 35 milliards que la Confédération prévoit d’investir en tout jus- qu’en 2045 environ pour de nouveaux projets routiers (sans compter l’entretien) ! Des sommes colossales dédiées à un mode de transport qui devrait pourtant décroître.
Les tarifs des transports publics explosent
Pour donner un ordre de grandeur, si on décidait plutôt d’allouer ces 5,3 milliards à la mobilité d’avenir, on pourrait alors construire deux RER comme le CEVA à Genève, 4 lignes de tramway et 200 km de pistes cyclables. Autrement dit : au lieu d’aggraver encore la situation avec des monstres projets autoroutiers nocifs et inutiles, on pourrait localement faire des pas décisifs vers la sortie de la dépendance automobile.
Pour le tournant dans la mobilité dont nous avons besoin, les transports publics auraient be- soin d’investissements massifs pour développer le réseau, améliorer les fréquences et la des- serte, mais aussi baisser leurs tarifs. Car, depuis 1990, les prix des billets CFF ont doublé, pendant que les coûts de la voiture n’ont connu qu’une hausse très modeste, inférieure même à l’inflation. La nouvelle hausse 2024 des tarifs CFF s’inscrit dans cette tendance délétère.
Les coûts réels du trafic sont « oubliés »
Le fonctionnement du Fonds pour les routes nationales (FORTA) implique que les recettes des taxes sur l’essence, la vignette et l’impôt auto financent les routes. Le côté en apparence « naturel » de ce mécanisme – la voiture paie pour la voiture – lui confère une certaine légitimité politique. Dans les faits, c’est une aberration.
D’une part, car c’est un cercle vicieux : le trafic finance l’élargissement des routes, ce qui entraîne du nouveau trafic, ce qui fait entrer encore plus d’argent pour les routes… et ainsi de suite.
D’autre part, car on ne tient pas compte des coûts « externes » du trafic : bruit, accidents, bouchons, atteintes à la nature, à la santé, etc. Or, ceux-ci s’élèvent à environ 10 milliards par an, un montant « oublié » dans tous les calculs !
Les « recettes » du trafic devraient donc plutôt servir à couvrir les dommages causés par celui-ci et surtout investir pour les réduire en finançant la transition dans la mobilité : transports publics attractifs et abordables, mobilité active sûre et confortable et aménagement compact du territoire.